70 agriculteurs en garde à vue dans des conditions de détention inhumaines
L'action coup de poing de la FNSEA Grand Bassin Parisien devant le Conseil d'État, le mardi 14 décembre, visait à dénoncer les «dérives de l'institution», notamment après sa récente décision sur les zones de non traitement (ZNT). Au final, 70 agriculteurs ont été en garde à vue dans des conditions insoutenables.
Cette action coup de poing a permis aux agriculteurs d'accrocher des banderoles sur les grilles du Conseil d'État : «Conseil des juges - République des juges». Des feux de paille et de palettes ont été allumés. La manifestation a été dispersée par la police vers 7 h 30 après quelques tensions. Plusieurs dizaines de personnes - autour de 70 - ont été interpellées et des contrôles d'identité ont été effectués. Le motif invoqué pour ces interpellations serait le non-respect des sommations de dispersion, a rapporté la FNSEA Grand Bassin Parisien. «Certes, on n'avait pas déclaré ce rassemblement, mais on n'a commis aucune dégradation, a expliqué son président Damien Greffin. On expliquait qu'on allait s'en aller vers 8h30 quand on a été encerclés puis arrêtés, pour vérifier les identités».
Le placement en garde à vue de plusieurs dizaines d'agriculteurs a provoqué incompréhension et colère de plusieurs syndicats départementaux qui ont appelé leurs adhérents à mettre en place des actions de blocage d'axes routiers en province pour demander la libération de leurs collègues retenus dans plusieurs commissariats parisiens. Les derniers participants à la manifestation placés en garde à vue ont finalement été libérés en début de soirée.
A lire aussi le témoignage de Marie-Françoise Lepers sur le site de nos confrères de l'Action Agricole Picarde : https://www.action-agricole-picarde.com/manifestation-au-conseil-detat-rien-ne-justifiait-les-gardes-vue-selon-marie-francoise-lepers
Complétement disproportionné !
Charlotte Vassant, président de l'Union des Syndicats Agricoles de l'Aisne, estime que cette garde à vue a été complétement disproportionnée.
Vous avez participé à la manifestation mardi à Paris devant le Conseil d'Etat. Comment était l'ambiance en quelques mots ?
Le but de cette manifestation était de faire pression sur le Gouvernement après la décision du Conseil d'Etat de renforcer les règles encadrant les distances d'épandages des produits phytosanitaires, les fameuses ZNT. Le Conseil d'Etat, qui vient casser nos chartes des riverains, n'en est pas à son premier coup d'essai puisqu'il sanctionne systématiquement plusieurs textes de loi comme celui sur les poussins ou encore sur les zones Natura 2000 où plusieurs millions d'hectares en France ne seront plus cultivables. Le Conseil d'Etat prend des décisions sans mesurer les impacts économiques sur nos exploitations.
La manifestation qui a débuté vers 6 h se passait bien, dans un esprit bon enfant. Nous n'avons rien dégradé, rien cassé. Pour faire notre feu, nous avions posé des tôles, de la terre pour éviter d'abimer. Mais environ 1 h après, nous avons été encerclés par la police et les CRS. Ils nous ont demandé nos papiers d'identité et nous nous sommes retrouvés dans le panier à salade !
Qu'avez-vous ressenti au moment de votre interpellation ?
En fait, nous avons été répartis sur plusieurs commissariats dans différents arrondissements. Après deux questionnaires, la prise d'empreintes digitales et de photos d'identité, nous avons été privés de nos vêtements et fouillés. Le port de lacets était interdit, donc pas de chaussure. On nous a privés de nos téléphones, nous étions totalement coupés du monde. Nous nous sommes retrouvés à 7 dans une petite cellule, volets fermés. L'odeur était insupportable, il y avait du sang sur les murs. Et aucun geste barrière !
Quel est votre sentiment aujourd'hui ?
Je suis indignée. Nous avoir placés en garde à vue était disproportionné par rapport à nos actes...c'est comme le Conseil d'Etat dans ses prises de décisions ! Nous n'avons rien détruit contrairement à d'autres qui se sont attaqués aux bassines ou aux stocks de semences. Je ne sais pas s'il y aura des poursuites à notre égard mais je sais que Christiane Lambert, présidente de la FNSEA et Samuel Vandaele, président de JA National ont rendez-vous avec Julien Denormandie, ministre de l'Agriculture.
Je tiens à remercier chaleureusement tous les agriculteurs restés dans les départements, qui rapidement ont commencé à bloquer les routes pour qu'on nous relâche. Une véritable solidarité s'est mise en place et c'est la force de notre syndicat.
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